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Il s’est dit prêt à un « bras de fer » avec Londres au sujet de l’immigration. Le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, en déplacement vendredi 29 novembre sur le littoral français, où plus de 70 migrants ont péri en 2024 en tentant de traverser la Manche, souhaite un accord entre Londres et l’Union européenne (UE). « Il faut une nouvelle relation avec les Britanniques. Le Brexit a changé la donne. Seule la conclusion d’un accord global entre le Royaume-Uni et l’UE peut réellement faire évoluer la situation », a-t-il déclaré dans un entretien accordé à La Voix du Nord publié vendredi.
« Si je dois engager un bras de fer, je le ferai, a averti le ministre. La France ne peut assumer seule la question. Le Royaume-Uni doit prendre toute sa part, nos partenaires européens aussi. Il n’est pas question d’acheter notre silence avec des livres anglaises. Je veux que les dommages causés, les efforts que nous faisons, puissent être pris en compte à leur juste mesure. » « Il faudra à terme une voie légale [d’immigration] vers la Grande-Bretagne et une voie de réadmission pas seulement en France mais aussi vers les pays frontaliers », a ajouté M. Retailleau.
Dans une conférence de presse à Ambleteuse (Pas-de-Calais), le ministre de l’intérieur a estimé que « la relation entre la France et le Royaume-Uni ne peut plus se résumer à la simple sous-traitance » par la France « du gardiennage de la frontière » entre les deux pays, en déplorant que « le Brexit a[it] détruit toutes les relations migratoires que nous avions avec l’outre-Manche, y compris les admissions légales ».
M. Retailleau doit recevoir la ministre britannique de l’intérieur, Yvette Cooper, le 9 décembre dans le Pas-de-Calais, puis il se rendra le 10 décembre à Londres pour une rencontre avec les pays concernés afin de « préparer cette relation nouvelle entre l’Union européenne et le Royaume-Uni ».
« Si les choses ne progressent pas, on dénoncera les accords du Touquet », qui depuis 2004 fixent sur le sol français les contrôles des personnes souhaitant se rendre au Royaume-Uni, a encore averti M. Retailleau.
« On arrive dans un cadre, dans une logique qui est totalement à bout de souffle », a-t-il encore estimé, rappelant que 72 migrants sont morts selon un décompte de la préfecture du Pas-de-Calais, ce qui fait déjà de 2024 l’année la plus meurtrière depuis l’apparition du phénomène des « small boats » dans la Manche, en 2018.
S’il dit ne pas pouvoir se « satisfaire de voir les morts s’ajouter aux morts », M. Retailleau exclut en même temps d’améliorer les conditions d’accueil des migrants sur le littoral, pour éviter d’augmenter encore « les trafics et l’appel d’air ». « Seule la fermeté peut régler les choses. La vraie générosité, c’est d’empêcher les gens de se noyer », a-t-il lancé au quotidien régional.
Dans la journée de vendredi, le ministère de l’intérieur a annoncé que l’ancien préfet Patrick Stefanini avait été nommé représentant spécial de Bruno Retailleau, sur l’immigration. La mission de Patrick Stefanini se concentrera « principalement sur le renforcement du dispositif de réadmission des personnes en situation irrégulière », précise le communiqué de la place Beauvau.
Cette nomination du haut fonctionnaire, spécialiste des questions d’immigration et figure des Républicains, survient au moment où le gouvernement est sommé de donner des gages au Rassemblement national pour éviter la censure de ses textes budgétaires.
Le ministre a également annoncé des renforts de police et la nomination d’un préfet chargé de coordonner l’action de l’Etat sur le littoral, face aux dizaines de milliers de traversées clandestines effectuées chaque année. Ce préfet spécialisé était réclamé par un collectif des maires du littoral que M. Retailleau était venu rencontrer pour son premier déplacement dans la zone depuis sa prise de fonction en septembre.
Plus de 200 personnes supplémentaires seront déployées pour renforcer les équipes de l’Office de lutte contre le trafic illicite de migrants (Oltim), la police aux frontières (PAF), les commissariats de Calais et Dunkerque ou encore pour intervenir dans les transports en commun. Des maires se disent en effet démunis face à la saturation de ces transports, utilisés à la fois par les habitants et les migrants tentant de rejoindre les plages.
M. Retailleau va en outre réclamer à Londres de cofinancer un fonds d’indemnisation pour les habitants et les entreprises locales ayant subi des dégradations de leurs biens. Il souhaite aussi une aide financière britannique pour les sapeurs-pompiers locaux, dont 12 % des interventions sont liées à la crise migratoire, et pour la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM), qui a effectué, selon lui, 5 500 sauvetages depuis le début de l’année.
Les associations venant en aide aux personnes qui campent sur le littoral dans l’espoir de rejoindre l’Angleterre ont déploré quant à elle une politique migratoire « inefficace et mortelle ». Outre des « dispositifs d’accueil » de part et d’autre de la Manche, elles demandent l’augmentation des moyens de secours en mer « pour que la Manche cesse d’être un cimetière ».
Depuis sa nomination, le 23 septembre, Bruno Retailleau a fait de l’immigration un marchepied politique au sein d’un gouvernement fragile, affichant une position dure, et en promettant un nouveau texte sur le sujet, moins d’un an après une loi vivement débattue.
Le Monde avec AFP
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